LES GAZ à EFFET DE SERRE

, par  Marie-Odile NOVELLI , popularité : 0%

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Quels sont les gaz à effet de serre ?

(dernière version : mai 2006)

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"Nous avons vu que l’effet de serre était du à la présence, dans l’atmosphère, de gaz qui interceptent les infrarouges émis par la surface terrestre.
Quels sont-ils exactement ? Sommes nous les seuls émetteurs de ces gaz ?

1.Les gaz "naturels" à effet de serre

Les deux principaux gaz responsables de l’effet de serre (et pas seulement de son augmentation récente) sont :

la vapeur d’eau (H2O),

le gaz carbonique (CO2).
Il en existe d’autres, et même beaucoup d’autres. Certains sont "naturels", c’est à dire qu’ils étaient présents dans l’atmosphère avant l’apparition de l’homme, d’autres sont "artificiels" : ils s’agit de gaz industriels qui ne sont présents dans l’atmosphère qu’à cause de l’homme. Les principaux autres gaz "naturels" à effet de serre sont :

le méthane (CH4), qui n’est rien d’autre que...le gaz naturel de nos cuisinières,

le protoxyde d’azote (N2O), nom savant du....gaz hilarant (qui ici ne l’est plus tellement),

l’ozone (O3), molécule formée de trois atomes d’oxygène (les molécules du gaz oxygène "normal" comportent 2 atomes d’oxygène seulement).

Dire que ces gaz sont "naturels" ne signifie bien évidemment pas que l’homme n’a pas d’influence sur leurs émissions. Cela signifie simplement qu’il y a aussi des sources naturelles. Pour les 3 gaz mentionnés ci-dessus l’homme ajoute sa part et augmente leur concentration dans l’air de manière significative. Mentionnons enfin que le méthane et le protoxyde d’azote sont pris en compte dans les accords internationaux (comme le protocole de Kyoto par exemple), mais pas l’ozone.

2.Les gaz "industriels" à effet de serre

Les principaux gaz "industriels" à effet de serre sont les halocarbures (formule générique de type CxHyHalz où Hal représente un ou plusieurs halogènes) : il s’agit d’une vaste familles de gaz obtenus en remplacant, dans une molécule d’hydrocarbure (le propane, le butane, ou encore l’octane, que l’on trouve dans l’essence, sont des hydrocarbures), de l’hydrogène par un gaz halogène (le fluor, le chlore...). Les molécules ainsi obtenues ont deux propriétés importantes pour nous :

Elles absorbent très fortement les infrarouges, beaucoup plus que le gaz carbonique,
Certaines d’entre elles (les perfluorocarbures par exemple) sont très "solides" : elles sont chimiquement très stables dans l’atmopshère, et seule la partie la plus "énergique" du rayonnement solaire et intersidéral (les ultraviolets et les rayons cosmiques) peut "casser" les plus résistantes de ces molécules une fois qu’elles sont dans l’atmosphère. Comme ces processus sont lents et n’interviennent que loin du sol, ces molécules d’halocarbures ont dont des durées de vie dans l’atmosphère qui peuvent être très longues, car il faut attendre qu’elles diffusent dans la stratosphère - donc qu’elles montent haut alors qu’elles sont souvent très lourdes - avant d’être "cassées", et cela peut prendre des milliers d’années.

Une famille particulière d’halocarbures, les CFC, est non seulement un gaz à effet de serre, mais aussi responsable de la destruction de l’ozone stratosphérique. Leur production a été progressivement interdite, par le protocole de Montréal signé en 1987, qui ne concerne pas les autres gaz à effet de serre.

Il existe également un autre gaz industriel que l’on mentionne souvent dans les milieux spécialisés, l’hexafluorure de soufre (SF6). Il est utilisé par exemple pour les applications électriques (transformateurs) et...les doubles vitrages. Il n’est pas émis en grande quantité mais est encore plus absorbant pour les infrarouges et résistant à la partie "dure" du rayonnement solaire que les halocarbures.
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3.Quels sont les gaz qui font le plus d’effet de serre et d’où viennent-ils ?

Si nous ne nous occupons pas de la raison pour laquelle ils sont dans l’atmosphère, le gaz qui fait le plus d’effet de serre est...la vapeur d’eau

Répartition des contributions à l’effet de serre des différents gaz présents dans l’atmosphère : l’eau, sous toutes ses formes, en représente les 3/4. La partie "autres gaz" est essentiellement due au gaz carbonique ou CO2. Source : GIEC

Mais si l’on se limite à l’effet de serre d’origine humaine, que l’on appelle parfois effet de serre "additionnel" (parce qu’il se rajoute à celui d’origine naturelle), ou anthropique, la répartition par gaz est totallement différente) :

Les émissions directes de vapeur d’eau (provenant des centrales électriques, de l’irrigation, des barrages, de la déforestation...) ne sont pas prises en compte. En effet, sur une planète couverte aux 2/3 d’eau (les océans), et compte tenu du fait que l’eau ne s’accumule pas dans l’atmosphère où son temps de résidence est de l’ordre d’une semaine seulement, les émissions d’origine humaine ne sont pas suffisantes pour perturber le cycle global de l’eau. L’action de l’homme peut très significativement perturber le cycle local de l’eau (la Mer d’Aral en offre un bon exemple) mais cela n’a pas de répercussions significatives au niveau de la teneur moyenne en vapeur d’eau de l’ensemble de l’atmosphère, or c’est celle-là qui gouverne l’effet de serre qui en résulte.

Ce qui précède explique pourquoi il n’est pas tenu compte de la vapeur d’eau, excepté dans quelques cas bien particuliers, lorsque l’on calcule les émissions de gaz à effet de serre liées à l’activité humaine.

Le gaz carbonique engendre environ 55% de l’effet de serre anthropique. Il y a bien sûr des émissions naturelles (la respiration des animaux, une partie de la putréfaction, les incendies naturels...). Le gaz carbonique venant des activités humaines (on parle d’émissions anthropiques, c’est à dire provoquées par l’homme) provient :

pour l’essentiel de la combustion des énergies fossiles (charbon, pétrole, gaz),

pour partie de certaines industries (par exemple pour la production de ciment),

enfin pour une part non négligeable de la déforestation, notamment en zone tropicale (voir la page sur les puits pour les explications).

Le méthane engendre environ 15% de l’effet de serre anthropique. Le méthane est un gaz qui se forme dès qu’un composé organique (un animal, une plante) se décompose à l’abri de l’oxygène de l’air (par fermentation ou putréfaction), par exemple au fond de l’eau ou sous terre. Les réserves de gaz naturel ne se sont pas formées autrement que par la décomposition, il y a très longtemps, de plantes et d’animaux, qui se sont d’abord transformés en hydrorcarbures liquides, puis en gaz. Une partie du méthane présent dans l’atmosphère est donc d’origine parfaitement naturelle, provenant notamment des zones humides (marécages, marais, etc) et...des termites !

Mais l’homme y rajoute sa part. Le méthane d’origine humaine provient :

pour une part de la combustion, notamment des brûlis en zone tropicale (la combustion du bois est toujours une combustion imparfaite, qui libère dans l’atmosphère des composés mal ou pas brûlés, dont du méthane),

de l’élevage des ruminants (vaches, moutons, chèvres, yaks...), car les aliments qu’ils ingèrent fermentent dans leur estomac, en dégageant du méthane (à titre informatif il y a environ 20 millions de bovins en France : le poids des vaches est supérieur au poids des hommes !),

de la culture du riz, car les zones humides en général émettent du méthane (comme nos marécages : les feux follets ne sont rien d’autre que la combustion spontanée du méthane produit au fond des marécages, là où les plantes pourrissent sans air),

des décharges d’ordures ménagères (encore le pourrissement) et du compostage,

des exploitations pétrolières et gazières, à cause des fuites de gaz naturel.

Les halocarbures engendrent environ 15% de l’effet de serre anthropique(pas d’émissions naturelles). Les premiers représentants de cette famille sont connus de tous : il s’agissait des CFC, désormais remplacés par d’autres gaz voisins, mais qui ne détruisent pas l’ozone stratosphérique. Ces gaz sont utilisés :

comme gaz réfrigérants (dans les systèmes de climatisation et les chaînes du froid) ; les émissions de ce poste proviennent essentiellement des fuites et mise à la décharge des systèmes de climatisation,
comme gaz propulseurs dans des bombes aerosols ; les fameux CFC constituent une sous-famille devenue célèbre des halocarbures. Le Protocole de Montreal a décidé leur éradication progressive car, en plus d’être de puissants gaz à effet de serre, ils sont aussi responsables de la diminution de l’ozone en haute altitude,

dans certains procédés industriels (fabrication de mousses plastiques, mais aussi...de composants d’ordinateurs ou de téléphones portables).

Le protoxyde d’azote (N2O) engendre environ 5% de l’effet de serre anthropique. Pour ce gaz il y a aussi des émissions naturelles, qui proviennent essentiellement des zones humides. La part "humaine" (anthropique) provient

de l’utilisation des engrais azotés en agriculture,

de certains procédés chimiques.

L’ozone (O3) troposphérique engendre enfin environ 15% de l’effet de serre anthropique. L’ozone est une variante de l’oxygène (une molécule d’ozone comporte 3 atomes d’oxygène au lieu de 2 pour le gaz "oxygène" normal) qui est naturellement présent dans l’atmosphère. Selon l’endroit où il se trouve il nous intéresse beaucoup ou il nous est nuisible :

dans la haute atmosphère, où l’on parle d’ozone stratosphérique (la stratosphère est la couche de l’atmosphère située entre 10 et 50 km d’altitude), il arrête les ultraviolets du soleil qui ont tendance à "casser" les liaisons chimiques indispensables à la vie ; il nous y est donc très utile (sans cette couche d’ozone stratosphérique la vie évoluée n’existerait probablement pas en dehors des océans),

dans nos villes, bien qu’il continue aussi à arrêter les ultraviolets les plus agressifs qui viennent du soleil (mais près du sol il n’en reste plus beaucoup à arrêter, heureusement), il montre aussi une autre de ses facettes, c’est que c’est un oxydant très agressif, et donc que nos poumons n’aiment pas beaucoup en respirer. L’ozone troposphérique (la troposphère est la couche la plus basse de l’atmosphère, celle qui "touche" le sol) est l’un des composants de la pollution locale, et provient indirectement de la combustion d’hydrocarbures. Ce terme de l’effet de serre est donc - outre le CO2 - une conséquence du transport (pour plus d’explications sur l’ozone, voir cette page).

Depuis le début de l’ère industrielle, c’est à dire depuis l’année 1750 environ, ce que nous avons mis dans l’atmosphère a pour effet d’introduire un "forçage radiatif" de l’ordre de 1% du rayonnement reçu.

Dit autrement, à travers ses émissions de gaz à effet de serre l’homme a modifié la situation "comme si" le soleil avait augmenté sa puissance d’environ 1%. Cela peut paraître peu. Pourtant, compte tenu des énergies considérables qui sont en jeu, de la fragilité de certains équilibres naturels, et du fait que ces effets agissent sur de longues périodes, c’est très significatif pour notre avenir, comme on le verra plus loin.
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Combien de temps restent-ils dans l’atmosphère ?

Les gaz à effet de serre, une fois dans l’atmosphère, n’y restent cependant pas éternellement. Ils peuvent être retirés de l’atmosphère :
soit par suite d’un phénomène physique. Par exemple la pluie, phénomène physique (condensation), enlève de la vapeur d’eau de l’atmosphère.

soit par suite d’un phénomène chimique intervenant au sein de l’atmosphère. C’est le cas pour le méthane, qui s’élimine par réaction avec des radicaux OH naturellement présents dans l’atmosphère, pour donner du CO2.

soit par suite d’un phénomène chimique intervenant à la frontière entre l’atmosphère et les autres compartiments de la planète. C’est le cas pour le CO2, qui est réduit par la photosynthèse des plantes, ou qui est dissous dans l’océan pour finir par donner des ions bicarbonate et carbonate (le CO2 est chimiquement stable dans l’atmosphère),

soit par suite d’un phénomène radiatif. Par exemple les rayonnements électromagnétiques "durs" émis par le soleil et les rayons cosmiques (qui sont de même nature que les rayons émis par une source radioactive) "cassent" des molécules dans la haute atmosphère. Une partie des halocarbures disparait de cette façon (ce sont généralement des molécules trop stables pour disparaître par réaction chimique dans l’atmosphère) ; certains halocarbures sont cependant encore suffisemment réactifs (encore suffisemment proches des hydrocarbures) pour disparaître comme le méthane, par réaction chimique avec d’autres composés de l’atmosphère.

Mais la très mauvaise surprise, c’est que mis à part la vapeur d’eau, qui s’évacue en quelques jours, les gaz à effet de serre mettent très longtemps à s’en aller de l’atmosphère. Cela n’est pas facile de savoir avec précision combien de temps sera nécessaire pour évacuer ce que nous émettons aujourd’hui, car l’atmosphère est un système très complexe, faisant intervenir tout un ensemble de phénomènes (physiques, chimiques, biologiques...), dont les scientifiques n’ont pas pencore perçé tous les mystères (on ne se doute pas, quand on regarde en l’air, que c’est si compliqué !). En outre l’augmentation de la concentration dont nous sommes à l’origine va trop vite pour qu’il soit facile de s’inspirer de ce qui s’est passé aux époques anciennes sur la vitesse d’élimination du surplus. Disons que ca va prendre longtemps !

On voit qu’il faut attendre de l’ordre du siècle avant que le CO2 ne commence à être évacué de l’atmosphère, de l’ordre de 1O ans pour le méthane, mais que certains halocarbures (CF4 ici) n’ont toujours pas commencé à décroître significativement au bout de 1000 ans.
Source : D. Hauglustaine, LSCE

Cela étant, on a désormais une estimation de la durée de séjour, c’est à dire du temps qui est nécessaire à ce que le gaz en surplus disparaisse de l’atmosphère, pour les principaux d’entre eux. Bien entendu cette durée de séjour (ou de résidence) n’est valide que pour autant que les conditions restent "égales par ailleurs".

Gaz

Durée de séjour approximative dans l’atmosphère

Gaz carbonique

100 ans

Méthane

12 ans

Protoxyde d’azote

120 ans

Halocarbures

jusqu’à 50.000 ans

On voit immédiatement ci-dessus que l’essentiel des gaz que nous émettons aujourd’hui, y compris le gaz carbonique que nous avons par exemple émis ce matin en venant travailler en voiture, ou hier en faisant fonctionner la chaudière, sera encore au-dessus de la tête de nos petits-enfants dans 1 ou 2 siècles. Et bien sur, tout le temps que ces gaz restent au-dessus de nos têtes, ils contribuent à l’augmentation de l’effet de serre."